Donc, en vrac :
Petite question perso, avez vous une approche liée a l'environnement, au développement durable, votre regard par rapport à notre société de consommation, je veux dire par là que l'industrie de la glisse utilise énormément de matières issues de l'industrie pétrochimique... pouvont nous trouver une alternative ou des solutions plus économes ? Pour conclure je te laisse le mot de la fin, tu as carte blanche. Un gros big up à toute l'équipe Air évo de notre part, et encore merci.
Skully.
Damien Richard, 43 ans.
13 ans de Kite, env. 1300 jours de snowkite …L’histoire snowkite démarre pour moi en 1995 sur le conseil de Manu Bertin que je coachais alors en Coupe du Monde de Windsurf. Après 23 ans de Windsurf, dont 9 ans au Cap vert dans les vagues, le kite m’a apporté une immense bouffée d’oxygène. Glisse vierge, tout à inventer, de nouveaux territoires à explorer et cela partout dans le monde … En 1995, le matériel existant est très décevant et peu adapté à la glisse que l’on envisage. Le manque créant le besoin je décide avec, recul aidant, beaucoup de naïveté de développer le matériel nécessaire. 13 ans après et beaucoup d’expérience en plus, je suis toujours dans le « délire » du développement et toujours passionné !
Pourquoi avoir choisi la neige plutôt que l’eau ?
Jusqu’en 2002, le matériel destiné à l’eau était, de façon générale dangereux. La navigation, les « anciens » s’en rappelleront était une suite ininterrompue de galères diverses et variées. Natif de la région du Semnoz, la neige m’a apporté au contraire de l’eau un plaisir facile, accessible et, si on évite les vents violents, sans danger. Au bout de 13 ans de kite, je préfère toujours la neige à l’eau !
Est-ce facile de développer un kite ?
Développer un kite peut-être simple si on est passionné et si l’objectif attendu est modeste. Ce qui a rendu mon métier difficile, c’est la prétention, égo mal placé au départ, de fournir aux meilleurs mondiaux le meilleur matériel possible. Et c’est là que tout se complique …
En terme de développement ?
D’une part parce qu’il faut avoir des idées et des bonnes pour faire évoluer le matériel. Ce qui, quand on regarde l’évolution des cerfs-volants caissonnés depuis 7 ans n’est ni évident, ni simple. D’autre part, l’élément humain doit être également envisagé. Chaque année, c’est pour moi une remise en cause intellectuelle énorme. Il me faut cibler en fonction des résultats du produit existant, les meilleures voies pour le faire évoluer et forcément en mieux. A mes côtés, le Team AIR, Agnès Fontenay et Romain Fabretti sont très exigeants. Chez AIR, les voiles sont développées pour les Champions du Monde et elles doivent leur permettre de garder d’année en année leur titre, face à la concurrence boudin et caissonné. Tout cela me donne beaucoup de pression à digérer car une fois le OK accordé par le Team, arrive la réaction du monde des Kiteurs, pas forcément objective, ni même sympathique … En résumé, le concepteur est un homme seul, qui paye très cher la volonté qu’il a de proposer « sa vérité » aux autres. Concevoir pour soi est donc simple, vouloir le faire pour les autres est à mon avis difficile et exigeant.
Techniquement comment cela se passe t’il ?
Tout d’abord, l’idée mûrie longuement. Il m’arrive de vivre avec des concepts depuis des années. Paul Amiell, notre designer met l’idée en plan sur la base d’un cahier des charges le plus précis possible. Un proto est monté. Le travail sur le terrain commence … Calage de voûte, calage d’incidence, calage du vrillage, réglage de freins, du choqué/bordé, puis affinage, affinage, affinage … Il s’agit du travail important, indispensable de mise au point et c’est là véritablement que naît le cerf-volant. Il est amusant de constater que beaucoup de cerfs-volants que le public utilise n’ont pas eu de mise au point … Ils sortent directement de l’ordinateur ! C’est pour cela que sur internet on peut trouver les réglages qui améliorent le produit acheté : si il y avait un vrai metteur au point dans ces sociétés, il n’y aurait pas besoin de réglage « bis » en kit sur le net. Chez AIR, la mise au point est faite avec beaucoup de rigueur par Romain Fabretti et moi-même. Cela nous prend en moyenne six à sept mois par gamme. C’est pour cela que nous vendons 2 gammes uniquement car il nous est impossible de vous vendre des produits jamais testés. Ce qui n’est pas le cas de tout le monde … Le nombre de protos est variable suivant les difficultés rencontrées pour « coller » à notre désir. Sur certains concepts, il en faut plusieurs. Ces tests se font à la fois en statique et en glisse dans différentes conditions de vent pour cerner le produit de A jusqu’à Z. Lorsque le produit est à vendre, le public est certain que le Champion du Monde à tout essayé et réussi dans toutes les conditions possibles ! Ce qui là encore n’est pas le cas de tout monde. Ayant un niveau de pratiquant moyen, je complète par mon expérience le ressenti de Romain. Nos voiles se doivent d’être utilisable sans aucun problème par un débutant ou un champion …
Quels sont les différents tissus et matériaux utilisé ?
Nos voiles sont fabriquées à 100% en tissu Porcher marine et cela depuis le tout début. Aujourd’hui, et essentiellement pour des problèmes de coût, la concurrence est à 90% en tissu chinois. Nous faisons le pari de la qualité et il est hors de question que cela change ! La référence que nous utilisons n’est pas la plus légère, mais elle est incroyablement résistante dans la durée. 100% hydrophobe vous pouvez continuer à voler sous la pluie ! Le Mylar du « flap » et de la « Box » est également Porcher Marine. Nos suspentes sont de marque Edelride depuis 5 ans. Nous gardons nos références car nous en sommes sûr. Depuis 5 ans, nous n’avons aucun SAV sur nos voiles et nos barres … qui dit mieux ?
Chez AIR, certains produits sont au catalogue depuis des années. Pourquoi ?
Si les produits sont bons, pourquoi les changer ? Je prends la barre par exemple : la notre est née il y a 5 ans. Pas un retour, par une barre cassée. C’est essentiel en terme de sécurité. Aujourd’hui la concurrence découvre que c’est pratique d’avoir une seule barre pour toutes les surfaces de voiles … c’est notre réflexion depuis 6 ans. Chez AIR nous ne faisons pas de marketing, nous vendons juste les produits les plus adaptés à notre pratique.
Envisages tu de concevoir des ailes fermées ou à boudins ?
- les ailes fermées, non, définitivement. C’est pour moi un compromis et comme tous les compromis, c’est jamais parfait ! Sur l’eau, je prends un boudin et sur la neige une voile à caissons ouverts. Dans mon travail, il est indispensable d’essayer tout ce qui existe. Je teste chaque année toutes les voiles du marché et je ne suis objectivement pas séduit. D’autre part, si c’était vraiment la solution, j’en ferais depuis longtemps !
- les boudins : la solution pour l’eau. Si il n’y avait pas la sécurité en jeu, la galère du gonflage et le manque d’autonomie dans certains cas, je l’utiliserais aussi sur la neige. Mon but en tant que concepteur étant de trouver la solution qui permette à une structure souple ouverte de donner les mêmes réponses qu’une structure rigide. L’avenir nous en dira certainement plus …
Comment bricoler son aile pour la modifier en fonction des envies ?
Je ne sais pas quoi répondre ! Il y a tellement de paramètres et très peu de latences. Le calage d’une voile se fait sur 4/5 degrés. Ce qui n’est rien. Nous concernant, je pense que si il y a quelque chose à faire … c’est fait ! ensuite, selon le type de navigation, le poids du capitaine et le degré de surtoilage accepté, chacun peut faire sa bidouille. Michael Regnier (80kg) et Romain Fabretti (60kg) utilisent le trim de façon radicalement différente et tous deux sont ravis avec la même voile ! Que dire ??
Présente-nous AIR EVOLUTION ?
AIR EVOLUTION, seule marque au monde spécialisée Snowkite. Comme nous le disons sur notre site : « fatigués de ne pas trouver le matériel dont nous avions besoin, on a décidé de le faire nous- même » Ceci précise notre exigence. Nous faisons le matériel pour nous et ceux qui le désirent peuvent avoir le même. C’est vraiment la différence majeure avec nos concurrents qui abordent le sport comme un marché et les clients comme des « gogos ». Notre communication se limite à un site internet qui précise la philosophie, explique nos gammes et rend compte du niveau des riders, de la beauté du sport et de la nature. Bien qu’étant la seule marque française de kite caissonné, bien qu’étant la marque française, eau et neige mêlées qui a ramené le plus de titres de Champion du Monde à la France vous n’avez jamais lu ou ne lirez jamais un article de presse spécialisée sur nous car comme nous n’achetons pas de publicité, les magazines ne font pas de rédactionnel sur nous. La famille AIR regroupe partout dans le monde des passionnés, qui d’année en année valorisent le sérieux et la qualité des réponses apportées à l’exigence de leur passion. AIR EVOLUTION c’est aussi le premier snowboard spécialisé Snowkite (Board 5 fois championne du monde), le concept « hybrid », le concept « Box », le plus gros Team sur la neige dans le monde en terme de niveau et de résultats. Mais c’est avant tout des copains qui sont heureux de rider ensemble, l’esprit libre, ne devant rien à personne et n’en attendant rien !
Petite question perso : avez-vous une approche liée à l’environnement ?
Évidemment, et pas suffisante de toutes façons ! Nous n’éditons aucun document papier, pas de catalogue, ni affiche ou poster et cela depuis la création de la société. Nos stickers sont en tissu.Tous nos envois sont fait avec des cartons de récupération. Nous ne fabriquons que ce qui nous est acheté donc, nous n’avons pas de produits perdus. Nous renvoyons aux sous-traitants les packaging, support et autres matériels réutilisables. Nos voiles ne sont pas fabriquées en Asie et nous privilégions les acteurs locaux ! Nos produits sont vendus sans blister ou sac plastique. Nous ne donnons pas de gadgets en contrepartie de l’achat. Nos produits sont testés pour éviter rappel ou retours intempestifs. L’énergie des kite est propre, renouvelable, jouissive ! Ceci étant, nous restons, pour le moment, dépendants de l’industrie pétrochimique …
Une dernière question : En tant que pionnier de ce sport, quel regard as-tu sur son évolution ?
De 1995 à 2000, on m’a systématiquement traité de « fou » et d’inconscient quand je pariais sur le développement du Snowkite … Aujourd’hui, c’est avec bonheur que je constate que partout où il y a de la neige dans le monde, les gens partagent ma passion ! Si cela ne m’a apporté la richesse, le simple fait de partager est bon ! J’ajoute qu’aujourd’hui après avoir bataillé pendant des années pour le développement du sport, de son environnement et de son matériel, je ne suis plus du tout indispensable … l’histoire est en route … longue vie à elle et bon ride à vous !
Voilà, encore un gros merci à Damien et son team super pro dans le bon sens du terme.
1 commentaire:
Et oué !!! c'est souvent comme ça !! t'as une idée super et tout le monde te prend pour un dingue !!! c'est fou çà !!!
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